Une 5G qui repose sur… la 4G
Le grand mensonge de la 5G française, c’est qu’elle n’a pas été déployée comme une vraie nouvelle génération de réseau. En réalité, la quasi-totalité du territoire fonctionne encore sur ce qu’on appelle la 5G NSA, pour Non-Standalone.
Cette version s’appuie sur le cœur de réseau 4G existant : les antennes, le matériel, et l’infrastructure de signalisation restent identiques. Seule une petite partie du flux de données transite en 5G.
Concrètement, votre téléphone affiche le logo 5G, mais il communique toujours avec un cœur de réseau 4G. Résultat ? La latence n’a pas changé, la stabilité non plus, et les gains de débit sont très variables.
L’ANFR (Agence Nationale des Fréquences) le confirme : la majorité des sites 5G autorisés réutilisent des antennes déjà existantes. Seuls une poignée de sites - une dizaine à peine, à l’échelle du pays - ont été déployés spécifiquement pour de la “vraie” 5G.
En clair, on ne vous a pas menti sur le fait qu’il y a de la 5G en France… mais sur ce qu’elle est réellement.
Le logo 5G ne veut rien dire
Souvenez-vous des campagnes marketing : “jusqu’à 10 fois plus rapide que la 4G !”, “jusqu’à 3 Gb/s !”. Dans les faits, ces chiffres n’existent presque nulle part. Free a même été condamné en 2024 pour publicité trompeuse : les tests montraient qu’en dehors de quelques zones urbaines très denses, la différence de vitesse était marginale.
Pourquoi ? Parce que les opérateurs français ont choisi de déployer la 5G sur des bandes de fréquences basses - autour de 700 MHz ou 2100 MHz - qui ont une excellente portée, mais une capacité limitée. C’est une 5G “de couverture”, pas une 5G “de performance”.
Pour bénéficier de vrais débits, il faut être connecté à la bande 3,5 GHz, la seule capable d’offrir plusieurs centaines de mégabits par seconde. Et encore : cette bande reste très minoritaire hors des grandes villes.
Autrement dit : la plupart des Français ont de la 5G sur le papier, mais de la 4G améliorée dans la réalité.
La “vraie” 5G arrive à peine
La 5G SA (Standalone), la version complète de cette technologie, commence seulement à apparaître. Free a ouvert le bal en 2024 avec une offre grand public compatible, mais les autres opérateurs l’ont longtemps réservée à leurs clients professionnels.
C’est seulement cette architecture, totalement indépendante de la 4G, qui permettra de réduire la latence, de gérer plusieurs réseaux virtuels en parallèle (le fameux network slicing), ou de faire fonctionner la voix directement sur le réseau 5G via la norme VoNR.
Mais là encore, la couverture reste très partielle : peu de téléphones compatibles, peu de zones activées, et un réseau encore en phase de tests. En 2025, la “vraie 5G” reste une promesse, pas une réalité quotidienne.
Et la 5G millimétrique ?
Le plus grand piège pour l’utilisateur, c’est le symbole affiché sur son smartphone. Ce logo “5G” ne garantit rien : ni le débit, ni la latence, ni même le fait que vous soyez réellement sur une infrastructure 5G.
En France, il peut aussi bien correspondre à une bande 700 MHz (très lente mais large couverture) qu’à une 3,5 GHz (rapide mais locale). Deux expériences radicalement différentes sous un même logo.
Et si on compare la France à d’autres pays comme les États-Unis ou la Corée du Sud, on mesure le retard pris sur les fréquences millimétriques : la fameuse 26 GHz, celle qui permet les débits à plusieurs gigabits, n’est toujours pas déployée commercialement. On parle d’autorisations expérimentales, rien de plus.
Chez nous, la bande de 26 GHz chevauche les bandes de données réservées Defense et les bandes dédiées à l’observation météorologique. La cohabitation n’est donc pas souhaitable. Aux USA, ils ont fait le choix de déployer la 5G millimétrique en 28 GHz, pour éviter ce problème (qui chez nous est utilisé pour le satellite large bande).
Un bilan plus nuancé qu’on ne le dit
Soyons justes : la 5G a tout de même apporté des progrès. Les débits médians ont augmenté (passant de 60 Mb/sec à 200 Mb/sec), les réseaux sont plus stables, et les opérateurs ont tenu leurs promesses en matière de couverture. Mais la communication initiale a largement survendu le saut technologique.
Les rapports de l’Arcep et de nPerf montrent bien cette dualité : la vitesse moyenne a doublé par rapport à la 4G, mais la révolution annoncée n’a pas eu lieu. La 5G française est une transition lente, un chantier évolutif, pas une rupture immédiate.
En conclusion
La 5G en France, c’est un peu comme une voiture électrique avec un moteur thermique sous le capot. On change l’étiquette, on parle d’avenir, mais la mécanique reste la même. Ce n’est pas un complot, simplement une stratégie : déployer vite, réutiliser l’existant, communiquer avant d’innover réellement.
La bonne nouvelle, c’est que la “vraie” 5G - celle en mode Standalone - est enfin en train d’arriver. Les premiers réseaux se mettent en place, les téléphones compatibles se multiplient, et les usages suivront. Mais si vous aviez l’impression que la 5G n’était pas si performante que ça, sachez que ce n’était pas qu’une impression !